Minotaure(s) – Hommage à Picasso Vallauris-Buitrago II – 2012
21 Juillet – 15 Novembre 2012 | Salle Municipale d’exposition de Buitrago del Lozoya
…le beau taureau qui m’engendra, le front couronné de jasmin…
Picasso (1935)
La tauromachie est un motif central dans l’œuvre de Picasso, ce jeu avec la mort qui se livre dans l’enclos sacré de l’arène le fascine depuis l’enfance. La figure du Minotaure qui en est le prolongement surgit en revanche dans son œuvre seulement en 1933, à l’occasion de la parution de la revue surréaliste du même nom, dont on lui a commandé la couverture.
La dualité physique du monstre mi- homme, mi- bête est pour Picasso la métaphore de l’affrontement qui a lieu au cours de la corrida. Le Minotaure incarne à la fois la puissance brutale du taureau et la vulnérabilité de ses possibles victimes, le torero ou le cheval. Dans ses dessins et gravures de l’époque il va s’approprier le mythe de l’homme- taureau en y transposant les tourments intimes de sa propre vie amoureuse. Ne se proclame-t-il pas lui-même dans son poème le frère du Minotaure ?
Dans son labyrinthe le Minotaure sera tour à tour redoutable et pitoyable. Incarnation d’une sombre puissance virile dans sa fureur priapique ou, d’une tendresse inattendue, caressant doucement du mufle la main d’une dormeuse dans la Suite VoIlard (1933-1937). Vulnérable, qu’il soit réduit à une impuissance symbolique, tel un Œdipe aux yeux crevés dans Le Minotaure aveugle conduit par une fillette (1934) ou comme honteux, avec une étonnante profondeur de son regard dans La Minotauromachie de 1935 où il est confronté à une petite fille, porteuse de fleurs et de lumière, qu’il n’ose pas regarder en face. Il peindra même en 1936 sur le rideau de scène pour Le 14 juillet de Romain Rolland La dépouille du Minotaure en costume d’Arlequin, un Minotaure vaincu qui s’effondre dans les bras d’un géant à tête d’aigle. Un autoportrait crypté ?